« Moi, empereur du Sahara, j’entends que le monde entier salue mon sacre… Moi, empereur du Sahara, j’affirme que chaque année sera une année de prospérité… Moi, empereur du Sahara, je ne supporterai pas l’immigration sauvage des tribus du Sud… Moi, empereur du Sahara, j’instaure la polygamie au sein de mon Empire… Moi, empereur du Sahara, je créerai une grande banque d’affaires musulmane, la FMI – Fiduciaire Mahométane d’Investissement… »
Le ton est donné. Celui de l’humour. Pour parler d’un homme qui a fait rire, pour de vrai, la France de la fin du XIX° siècle et du début du XX°. Jean-Jacques Bedu a exhumé des archives l’histoire de Jacques Lebaudy, héritier d’une des plus grandes fortunes de France (des raffineurs de sucre de père en fils) pour la romancer avec talent. Quelques clins d’œil renvoient à notre société actuelle. L’écriture très expressive entraîne dans le récit d’un parcours hallucinant parfaitement authentique. On est embarqué dès les premières pages au cœur du krach de l’Union Générale en 1882 (dont Zola nourrit son « Argent ») ; puis à bord du Frasquita (le voiler qui emporta « Jacques Premier » vers le Sahara) ; jusqu’à la fin pitoyable, aux Etat-Unis, de ce souverain virtuel qui avait vraiment un grain (ni de sable ni de sucre).
Auteur de nombreux essais – dont celui sur Francis Carco fut plusieurs fois primé -, Jean-Jacques Bedu fait ici une entrée fracassante dans le roman. Jubilatoire ! Souhaitons-lui de devenir un jour l’empereur des librairies…